[topo] La Kungsleden en été

La Kungsleden (en français : piste royale) est un itinéraire de grande randonnée suédois qui traverse la Laponie du Nord au Sud, sur environ 450km. On peut parfaitement le comparer à nos GR français, sauf peut-être pour la fréquentation. C'est un itinéraire idéal pour une première expérience dans le grand nord ; le ravitaillement est aisé et le balisage excellent. En outre, de nombreux refuges ponctuent le parcours, offrant des possibilités d'abri évidentes. Voici donc un petit topo pour qui désirerai tenter l'aventure lapone.



:: Itinéraire
La piste s'étend de la petite station d'Abisko (au dessus du cercle polaire) à la ville d'Hemavan, pour un total d'environ 450km. On peut diviser la Kungsleden en plusieurs parties.
Note : les distances kilométrique et les dénivelés sont donnés d'après le topo de Claes Grundsten, sauf mention particulière.

Abisko-Saltoluokta : 109km, D+ 1405m, D- 1340m

Point de départ de la piste royale, Abisko s'atteint en train par la ligne Kiruna-Narvik. Cette section est la plus fréquentée par les randonneurs dont la majorité bifurque au refuge de Singi pour se diriger vers Kebnekaise. Le dénivelé est très faible, on longe principalement de grandes vallées pendant des dizaines de kilomètres. C'est ici que se situe le plus haut point de la Kungsleden, Tjäktja Pass à 1150m d'altitude. On trouve un refuge tous les 15km environ. La moitié d'entre eux disposent d'une petite épicerie. Il faut traverser un lac à la rame après Teusajaure. Sur l'autre rive, a quelques centaines de mètres du chemin se trouve un abri de secours (indiqué par un panneau) avec un poêle. Une fois à Vakkotavare, il faut rejoindre Saltoluokta en bus (départ 11h15), puis en bateau à moteur(qui attends le bus pour partir).
Ravitaillement à Saltoluokta, petite Fjällstatsion vendant équipement outdoor et nourriture (peu diversifiée et très cher!).









Saltoluokta- Kvikkjokk : 73km, D+ 1050m , D- 1100m

C'est à partir de là que la fréquentation commence à baisser sérieusement. Cependant, on trouve encore de nombreux refuges. 9km après Saltoluokta se trouve un abri. Si vous y passez la nuit, attention à partir suffisamment tôt car le bateau de Sitojaure part à 9h (Sitojaure est à 11km de l'abri). Vous pouvez aussi ramer mais la distance est de 6km…18km si un seul bateau se trouve de votre côté ! Attention également à Aktse : il y a un lac à traverser (le delta du Rapadalen), à la rame ou en barque à moteur (départ 9h). Camper près du refuge coûte 10€/pers (!!) et le coin est infesté de moustiques ! Je conseil donc de bivouaquer dans la montagne juste avant ; gratuit et sans moustiques. Entre Aktse et Partestugan se trouve un autre abri de secours, dans la montagne. La dernière partie entre Partestugan et Kvikkjokk est plate et forestière.
Ravitaillement à Kvikkjokk, dans une minuscule boutique de l'hôtel du stf. Le strict minimum…


Kvikjokk-Jäkkvik : 96km, D+ 2230m, D- 1970m
note : ces distances données par le topo sont erronées. En réalité on aurait plutôt 86km…
Un vrai morceau de Wilderness ! La majeure partie de ce tronçon (jusqu'à Vuoatviken) ne comporte qu'un abri de secours avec un téléphone d'urgence. Au départ de Kvikkjokk il faut prendre un bateau (payant!) pour traverser la rivière. Même si cette section est un peu plus sauvage, la piste reste très bien balisée. Attention à la bifurcation entre piste d'hiver et piste d'été au niveau du plateau, au dessus de Tsielekjokkstugan. Bien suivre les pierres rouges ! A Vuonatviken, un trajet en bateau (départ 9h je crois) nous amène de l'autre côté du grand lac. A partir de là, le topo mentionne 8km. Faux ! Il s'agit de l'ancien chemin qui obligeait à reprendre une barque. La nouvelle piste rallonge de 12km. Le chemin, en cours de création, est balisé par de petits rubans bleus attachés sur les branches des arbres. Orientation très délicate par temps de brouillard. Aucun point de repère puisque nous sommes en pleine forêt. Le terrain, accidenté et marécageux n'est pas aménagé de planches comme ailleurs. Un petit lac est à traverser à la rame.
Ravitaillement à Jäkkvikk, dans une supérette de station essence (attention,fermeture du magasin à 17h).





Jäkkvik-Ammarnäs : 83km, D+ 1740 ,D- 1670

On trouve plusieurs abri sur cette section, disposants tous d'un poêle à bois, voir d'un cuisinière pour celui qui se situe juste après Jäkkvik. Le balisage est toujours très bon. Ne pas trop se fier aux indications kilométriques sur les panneaux, qui sont souvent erronées. Un peu avant la fin de l'étape, le sentier bifurque dans deux directions. Toutes deux mènent à Ammarnäs ; l'une fait 17km tandis que l'autre en mesure 31….
L'arrivée à Ammarnäs (par le sentier de 17km) s'effectue sur la route goudronnée. Au centre du village, on y trouvera une petite supérette, offrant donc une possibilité de ravitaillement complet et varié !




Ammarnäs-Hemavan : 78km, D+ 1640m, D- 1290m
La fin approche ! Le sentier monte directement à Aigertstugan (refuge avec mini épicerie), puis traverse la montagne et redescend en forêt jusqu'à Servestugan. Le chemin remonte ensuite quelques kilomètres, puis redevient plat/descendant. La dernière étape (Syterstugan-Hemavan) possède un côté plutôt alpin : longue vallée étroite et encaissée, hauts sommets, glacier.
Une fois à Hemavan, il faut descendre le long des lotissements pour atteindre la route principale, tout en bas. Supermarché, hôtels, camping (contre l'aérodrome!). Liaison avec le reste de la Suède grâce à l'avion et au bus.





Orientation et balisage


Toute la Kungsleden est balisée par des marques rouges. On distingue en fait deux types de balisage: celui d'hiver (grandes croix rouges) et celui d'été (marques rouges sur les pierres et les arbres). Souvent, les deux sentiers se croisent pour ne faire qu'un seul chemin. Parfois cependant, ils partent chacun d'un côté, la piste d'hiver traversant tout droit à travers les marécages alors que celle d'été les contourne. Le chemin d'été est également aménagé : planches (très utiles dans les zones humides), pont suspendu…
On trouve régulièrement des panneaux directionnels indiquant souvent le nombre de km à effectuer jusqu'à la prochaine étape. Ne pas trop se fier toutefois aux distances écrites qui sont le plus souvent fausses (ex : une distance annoncée à 15km deviendra 12km alors que nous avons marchés plus de 5km entre les deux panneaux&#8230smile.
Faut-il alors prendre une carte ? Parfois nous en avons acheté, d'autre fois non. En fait, il est plutôt difficile de se perdre sur une piste aussi bien balisée. Sauf peut être évidement en cas de brouillard ou de tempête, mais la carte n'est alors pas d'une grande utilité. L'intérêt d'avoir une carte est de pouvoir repérer sa position exacte sur la piste lorsqu'on croise une rivière, un lac, un pont… Mais toutes les cartes, cela représente un cout et un poids non négligeable. L'idée que nous avons expérimentés avec succès à la fin, est de prendre la carte en photo (affichée au mur de quasiment tous les refuges), puis de zoomer de temps en temps sur le petit écran de l'appareil pour savoir où on se trouve. Avec ce système on ne peut utiliser la boussole, mais elle ne semble pas indispensable sur la Kungsleden. Le GPS est inutile.

Ravitaillement
On trouve de la nourriture à vendre dans de nombreux refuges ainsi que dans les Fjällstations et les petits villages. Les prix sont excessivement chers, surtout dans les refuges et stations. Par exemple, à Saltoluokta, un paquet de biscuit nous à couté 35sek ! (plus de 3€50). La nourriture n'est pas très diversifiée ; on s'est souvent contenté de Wasa, de pâtes et de jambon en tube. La viande de renne est extrêmement cher (50€ le kg).
De la nourriture est en vente à chaque point d'arrivée et de départ des « étapes » (voir plus haut). On en trouve également dans les refuges entourés d'un carré noir sur la carte (ex: Alesjaure).
L'eau est disponible partout et instantanément : il suffit de remplir sa bouteille dans la première rivière venue. Pas besoin de pastilles micropur ou aquatabs, elle est saine et sans danger. Même dans les lacs nous en avons bu sans problème. Je portais un demi litre d'eau et cela m'a tout le temps suffit. C'est très agréable d'avoir un kg de moins à porter !

Refuges, abri et bivouac

On trouve des refuges en moyenne tout les 15km, du moins jusqu'à Kvikjokk. Un refuge sur deux dispose d'une petite épicerie. On ne peut pas toujours s'abriter gratuitement dans les refuges. Il faut en général payer (60sek…40 si on est membre du STF, le « club alpin » suédois). Pour ce prix, on peut s'abriter et utiliser la cuisine (gaz, popote et couvert).
La Kungsleden est également ponctuée d'abris. Il s'agit de petites cabanes spartiates avec une banquette, une table et un petit poêle à bois (du bois est disponible soit dans l'abri, soit dans une cabane adjacente). On en trouve notamment:
-Au col de Tjäktja,
-Après le lac de Teusajaure (100m au dessus)
-9km après Saltoluokta,
-Sur la rive sud de Sitojaure
-Une vingtaine de km après Kvikkjokk (Tsielekjokkstugan)
-13km après Jäkkvik
-A Sjnsjultje
Le bivouac est autorisé sur tout le parcours. Généralement payant aux abords des refuges, il devient gratuit quelques centaines de mètres après. Attention à Aktse : camper coûte 100 sek/personne (10 euros !). Il faut soit remonter dans la montagne, soit dormir de l'autre côté du lac pour ne pas avoir a payer ce prix exorbitant !

Traversée des lacs
De nombreux lacs jalonnent le parcours. Si en hiver le franchissement de ces étendues (gelées) ne pose pas de problème, il n'en est pas de même en été. Certaines étendues d'eau sont équipées de barques à rames. Le principe est simple : un côté avec deux bateaux, l'autre avec une seule barque. Il doit toujours subsister au moins une embarcation par rive. Par conséquent, si on arrive sur la berge à un seul bateau, il faut traverser le lac, revenir avec deux, en laisser un puis repartir avec le dernier. Ce qui triple la distance à parcourir…
D'autres passages ne sont pas équipés de barques, il faut donc utiliser un canot à moteur, payant. Il en est de même si l'on ne souhaite pas ramer. Prix moyen de la traversée : 120 sek/personne. Le bateau part généralement le matin (9h) de la rive nord (côté Abisko). Celui qui arrive depuis la rive sud trouvera parfois un téléphone ou un drapeau à lever pour signaler son besoin de traverser la rive. Voici la liste des lacs à traverser (* = barques disponibles) :
-Teusajaure*
-Saltoluokta
-Sitojaure*
-Aktse*
-Kvikkjokk
-Vuonatviken
-Jäkkvik*




::Randonner en Laponie

Météo
Sur 21 jours de marche, 17 se sont effectués sous la pluie (le plus souvent intermittente). Le temps peu changer très rapidement sous ces hautes latitudes, il est donc difficile de réaliser des prévisions météo fiables sur plus de 5 jours. Le mois de juillet est le plus arrosé, avec une moyenne de 54mm d'eau à Abisko (Paris = 7,9mm). La température moyenne en été est de 13°C à Kiruna.
A noter que sous ces hautes latitudes, le soleil ne se couche jamais. L'amplitude thermique jour/nuit est donc très faible.

Équipement
Emmener impérativement de quoi affronter la pluie ! Veste, sur-pantalon, couvre sac (ou sacs étanches) semblent indispensables sur ce parcours. Des guêtres sont également appréciables pour éviter que l'eau ne ruisselle dans les chaussures (nous n'en avions pas). Pour les couches thermiques, polaire ou/et doudoune (synthétique de préférence) feront l'affaire. Moustiquaire de tête indispensable !

Pour bivouaquer, la plupart des randonneurs utilisent des tentes 4 saisons ; véritables bunkers capables d'affronter les pires conditions. On peut cependant faire plus léger et partir avec une petite tente de randonnée . Les abris non fermés et les tarps me semblent à proscrire, à cause des moustiques. Un sac de couchage 0°C confort est un bon compromis pour affronter sereinement les nuits lapones.
Pour manger, nous avions un réchaud à bois. Difficile de faire un feu sous une averse, même si l'écorce de bouleau est un bon combustible. Mieux vaut prendre un réchaud à gaz, qui permettra de cuisiner sous la tente comme dans les abris en bois. Des cartouches vissables Primus sont en vente dans la plupart des ravitaillements (à Abisko, il n'y avait par contre que des gros modèles, 645gr).
En somme, une liste d'équipement pour parcourir la Kungsleden est comparable à celle qu'on emporte pour randonner en montagne l'été vers 2500m (en y rajoutant comme paramètres les moustiques et les fortes pluies).

S'y rendre

Rejoindre Stockholm, généralement en avion. De là, plusieurs options sont possibles pour atteindre Abisko : le train (compter environ 17h de train) ou l'avion jusqu'à Kiruna, avec la compagnie Scandinavian Airlines (SAS), puis le train sur la ligne Kiruna-Narvik. Pour repartir de Hemavan, ces mêmes options sont possibles pour retourner à Stockholm : train+bus (changement à Vännas) ou avion.
A noter qu'on peut aussi se rendre sur la Kungsleden depuis la Norvège, en prenant le train à Narvik.
Liens :-SJ (sncf suédoise) : http://www.sj.se
-Avion depuis Hemavan : https://bookingnextjet.sita.aero/itd/itd


Prix : L'aller-retour depuis Lyon St Exupery avec SAS puis British Airways nous à couté environ 450€ chacun. Voici notre trajet :
Aller : Lyon-Copenhague-Stockholm-Kiruna (avion)-Abisko (train)
Retour : Hemavan-Vännas(bus)-Stockholm-Londres-Lyon(avion)
On peut trouver moins cher en partant sur une compagnie low cost comme Easy Jet ou Ryanair (non présentes à Lyon), et en prenant le train depuis Stockholm, notamment pour les moins de 25 ans.

Vie sur place

Monnaie : La monnaie nationale est la couronne suédoise (sek). 1 sek = 0,107 euros ; soit 1 euros = 10 sek environ.
Le cout de la vie le long de la Kungsleden est cher ! Les vivres proposés dans les refuges et les stations sont assez hors de prix ( à titre d'exemple, un paquet de gateaux de 190gr coute 35 sek). Prévoir donc un budget en conséquence !

Langue : La langue officielle est le suédois. Cependant, la plupart des habitants maitrisent parfaitement la langue de Shakespeare. Nul besoin donc de parler suédois, il suffit d'avoir quelques notions élémentaires d'anglais.

Bibliographie :
En anglais :Kungsleden: The Royal Trail Through Arctic Sweden (Claes Grundsten)
En allemand : Schweden: Kungsleden (Michael Hennemann)





Pour l'album photo, cliquez ici :wink:

Bravo les p'tits gars !
Belle rando, bel article, belles photos…Belle aventure!
Ça donne envie! :slight_smile:

une gardienne de refuge (à Singi) m'avait dit que les moustiques n'étaient plus un problème en fin de saison. A quelle époque êtes-vous passés?

Merci beaucoup pour ton récit Volo !
Est-ce que la longue et sauvage section Jäkkvik - Hemavan est belle ? Ma question : j'ai compris qu'elle était plus sauvage (et qu'il y a moins de monde) que la partie nord de la Kungsleden mais est-elle aussi spectaculaire (falaises, pics&#8230smile ?
Pourquoi n'êtes vous pas passé par le coté ouest du Sarek à savoir le Padjelanta ?
Dernière question : est-ce que ça t'a donnée envie de tenter l'expérience l'hiver ?

Un grand merci pour ce récit qui nous emmène ailleurs !

@+
Régis

Salut Volo, ton récit fait un bien fou après une journée de boulot… et donne surtout envie de partir :smiley:

Cyrille M a écrit :
ton récit fait un bien fou après une journée de boulot…

Ah ben ça marche aussi après une journée de grève ! 8-)
stef a écrit :
Ah ben ça marche aussi après une journée de grève ! 8-)
:-D :-D o^k
Est-ce que la longue et sauvage section Jäkkvik - Hemavan est belle ? Ma question : j'ai compris qu'elle était plus sauvage (et qu'il y a moins de monde) que la partie nord de la Kungsleden mais est-elle aussi spectaculaire (falaises, pics&#8230smile ?

La dernière étape est très encaissée, elle rappelle beaucoup les Alpes. Avant Ammarnäs, il y a aussi du relief. Sinon, c'est vrai que la majorité de la partie sud est plutôt composée de fôrets et de grands plateau, mais sans la présence de hauts sommets comme au nord.

Mais la section la plus sauvage se trouve juste avant : Kvikkjokk-Jäkkvik. Il y a du relief aussi, et surtout, quasiment aucun autre marcheur…

Mais c'est vrai que le nord de la Kungsleden est l'endroit le plus montagneux.

Pourquoi n'êtes vous pas passé par le coté ouest du Sarek à savoir le Padjelanta ?

En fait, je n'y ait pas pensé. On c'est donné comme objectif la Kungsleden donc on est resté dessus. Au moins, il en reste à faire pour la prochaine fois ;-)

Dernière question : est-ce que ça t'a donnée envie de tenter l'expérience l'hiver ?

Oui, énormément ! J'y pense de plus en plus…
vincent a écrit :
une gardienne de refuge (à Singi) m'avait dit que les moustiques n'étaient plus un problème en fin de saison. A quelle époque êtes-vous passés?

Oui, effectivement, j'ai entendu qu'en fin d'été (mi aout?), il n'y avait quasiment plus de moustiques.
Nous sommes partis au mois juillet donc pour le coup c'était raté…