Raid au cap Nordkinn en Norvège Norvège > Norvège du Nord > Finnmark

polpulka

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Durée : 2 à 4 jours

Difficulté : Moyenne

Pulka : non accessible

Ce magnifique raid de 16 jours en solitaire m’a emmené de Kaamanen en Finlande au Cap Nordkinn et le port Mehamn en Norvège. Ce long parcours d’environ 350 km comportait trois étapes aux paysages différenciés : jusqu’à Ustjoki – des lacs, des marécages, des forêts des pins et des bouleaux rabougris, ensuite la traversée des hauts plateaux entourés des montagnes jusqu’à Ifjord et enfin, en s’approchant du Cap, les vues de plus en plus larges sur les fjords bordés des falaises abruptes avec des échappés vers la mer.

Étape 1 : Kaamanen – Ustjoki (5 jours ~110 km)

L’auberge à Kaamanen (Kaamasen Kievari Hostel) était le point de départ idéal avec l’arrêt de bus (direct d’Ivalo) juste devant et la rivière Kaamasjoki, qui mène vers le Parc Kevo, juste derrière. Selon mon projet initial je devais la remonter pendant 2 jours et ensuite contourner le Parc Kevo par les tunturis à l’O et redescendre au Nord vers Ustjoki.

Après avoir conditionné la nourriture achetée à Ivalo (où il y a de tout, même 2-3 sortes des plats lyophilisés) et passer la nuit dans un bungalow confortable (42€), je suis parti dans la matinée de 3 mars, un peu pressé de monter sur les hauteurs par la température qui s’est dangereusement rapprochée de 0°C. Le début a été très agréable : une piste de motoneige d’abord suit la rivière et ensuite oblique vers O puis N en traversant les forêts des pins et la nationale vers Karigasniemi. Au dixième kilomètre elle traverse à nouveau Kaamasjoki. J’ai quitté donc la piste à cet endroit et j’ai commencé à remonter la rivière qui a été vierge de toutes traces…. Et pour cause : au bout à peine de 300 mètres j’ai senti une drôle sensation du mou sous les spatules – c’était de l’eau ! J’ai eu beau d’essayer de m’approcher des berges – partout c’était pareil – infranchissable! Et pourtant le lit de la rivière avait 30-40 m de large. J’ai tenté donc les marécages couverts des bosquets des bouleaux mais je m’enfonçais à 50-60 cm et ma pulka, bien chargée, autant. Après une mûre réflexion au cours d’un repas j’ai pris une difficile décision d’abandonner cet itinéraire ; les risques de s’embourber, et ainsi de ne pas pouvoir atteindre le Cap, ont été réels surtout si le dégel survenait.

J’ai me suis donc rabattu sur mon « plan B » : suivre la piste balisée de motoneige qui rejoigne Ustjoki par les hauteurs à l’E de la route nationale.

carte
Kaamanen - Ustjoki

Cette solution était sécurisante surtout par mauvais temps, car le balisage par les poteaux coiffés d’une croix tout les 30-40m permettais l’avancement facile et rapide. J’ai eu la preuve encore le même après-midi quand le vent de l’O s’est renforcé et la visibilité s’est réduite à un seul poteau. Heureusement j’ai trouvé un bosquet de pins où, protégé par un mur, j’ai pu même allumer un feu.

Le lendemain (2ème jour) le vent a tourné vers N - NO ce qui, certes a éloigné le danger du dégel, mais a rendu la progression difficile – surtout sur des lacs (heureusement peu nombreux). Malgré cela j’ai parcouru 27 km jusqu’au lac Cieskadasjavri où j’ai planté la tente juste à côté de la piste, car pendant toute la journée je n’ai pas vu une seule personne (sans ou avec motoneige) même si de temps à autre j’ai pu entendre le bruit de la nationale à 1-2 km…. Par la suite la piste s’éloigne de la route à une bonne distance de 10-15 km alors on est au calme complet.

Vers
Vers le lac Johttejavri

Le troisième jour était moins venté et plus ensoleillé avec une bonne température de ~-10°C – un régale si ce n’était la traversée du lac Johttejavri (3,5 km) contre le vent. Ceci a été récompensé par le repas dans une confortable cabane au bout du lac. C’est là aussi que j’ai vu les trois motoneiges qui sont passés à 50 m, les seuls jusqu’à Ustjoki ! Pour combler le sentiment du bonheur le ciel au-dessus de ma tente cette nuit (20 km plus loin) a été éclairé par des aurores boréales.

Le lendemain (4ème jour) au matin tout a été couvert par 5 cm de poudreuse et le vent s’est calmé. C’était le bonheur pur – j’ai avancé come sur un nuage traversant les étendues des marécages, des lacs à perte de vue avec à l’horizon O les tunturis du Parc Kevo… La nuit m’a arrêté à l’embranchement de la piste vers Nuorgam – 29 km parcouru !

Coucher
Coucher du soleil dans le vent

Il n’est resté que 13 km (en partie en descendent pour rejoindre Ustjoki). Je suis arrivé donc à l’auberge Lomakulä Valle (2 km à l’O d’Ustjoki) au début d’après-midi (5ème jour) avec une journée d’avance sur mon plan. Je l’ai utilisé alors pour me reposer (6ème jour – à 80€/nuit quand même mais 120€/nuit pour 4 personnes) et pour me réapprovisionner dans la superette du village (tout y est). Par contre il n’y a pas de distributeur de billets même s’il y a une banque où on peut échanger les billets d’euro (pas de carte ou chèque) contre les couronnes norvégiennes (7,6 NOK/€).

Étape 2 : Ustjoki – Ifjord (3 jours - ~70 km)
La traversée du pont frontalier sur Luosnjarguoika se fait sans aucune formalité (même si la Norvège n’est pas dans l’UE elle fait partie de l’Espace Schengen) et le douanier (invisible) s’occupe uniquement des camions… Deuxième bonne nouvelle de la matinée (7ème jour) c’était les traces de motoneige sur la piste forestière qui remonte la vallée de Levessejohka vers le village estivale d’éleveurs des rennes. Je suis monté donc sur les hauteurs sans trop de difficultés et par le beaux temps. Une fois là haut j’ai eu quelque problèmes pour m’orienter dans le dédale des petits vallons (même avec la carte 1 :50000), mais finalement, poussé par le vent SO j’ai trouvé le canyon de Gappatjohka qui m’a emmené vers la cabane d’éleveurs qui était ouverte et bien équipée. J’ai dormi à l’abri du vent qui soufflait de plus en plus fort – un confort bien mérité après 23 km et 400 m de dénivelée positive. Voir l'itinéraire sur Openrunner

Cabane
Cabane laponne (Gappatjohka)

Le lendemain (8ème jour) le vent soufflait toujours aussi fort, mais le soleil s’est imposé avec la visibilité parfaite. Cela m’a permis de longues visées de plusieurs kilomètres et mon seul souci était de trouver des bons passages entre les collines qui étaient parfois bien dégarnis de neige et couverts des cailloux offrant les paysages lunaires. Les rencontres avec quelques familles des rennes rendaient ces paysages un peu moins austères. Ce cheminement plein N (en tenant compte de l’écart avec le N magnétique de 11°-12°) était d’une facilité déconcertante. Même s’il n’y avait pas de traces de motoneiges (en faite j’ai traversé 2 pistes balisées mais orientées E-O qui n’étaient pas marquées sur ma carte) la surface de neige était bien tassées par le vent. Seules des vaguelettes de neige glacée qui, parfois, pouvaient atteindre 20-30 cm de hauteur et le champs des cailloux freinaient la progression.. C’est ainsi, poussé par le vent, j’ai eu la surprise de découvrir au coucher du soleil la ligne HT qui traverse cette région E - O m’assurant que j’avais fait 28 km dans la journée ! Le bivouac sur Silisjohka a été agrémenté par des magnifiques aurores boréales qui ondulaient sur tout le ciel…

Plateau
Plateau Leammonurki

Le troisième jour de cette étape (9ème jour) il faisait toujours aussi beau et venté. La remontée de la rivière et des lacs Silis ont été très faciles mais par la suite, pour rejoindre les grands lacs Bordejavrrit et Stuoraluohkajavri, il fallait traverser les hautes collines, parfois au allures des petites montagnes. En arrivant au-dessus d’Ifjord pour la première fois j’ai été en face d’un magnifique panorama du fjord du même nom avec les falaises qui l’entourent. Une grande émotion. Mais pour y arriver il fallait descendre de 300 m sur les fortes pentes verglacées ou sans neige. C’est effet des aléas climatiques de cette région : même en pleine hiver on peut s’attendre à des dégels et les pluies verglaçantes. Il me fallait un peu de temps pour trouver le passage enneigé mais même là il fallait faire des portages. Ensuite encore la traversée des bosquets des bouleaux un peu trop serrés… Finalement je suis arrivé à l’auberge que 3 heures plus tard. A part d’elle il n’y a pas de commerces à Ifjord – donc pas d’approvisionnement (sauf en essence).

Panorama
Panorama du fjord Ifjord

Étape 3 : Ifjord – Cap Nordkinn – Mehamn ( 7jours ~170 km dont 55 sans pulka)
Même si le temps était un peu maussade avec la température à peine négative (10ème jour), la chance ne m’a pas abandonné : la piste vers le N se trouve juste en face de l’auberge – elle est balisée et en plus il y avait des traces toutes fraîches de motoneige. Cela m’a évité de galérer en montant dans la forêt et la neige profonde. Elles m’ont accompagné pendant 5 km vers des petites montagnes (hautes de 300 m) où la neige portait déjà bien. Seule difficulté c’était des montées raides aux cols où parfois il fallait déchausser les skis et faire des marches en soufflant tout les 5 pas…(toutefois sans faire des portages). En plus le temps s’est dégradé et la visibilité était presque nulle. Heureusement je n’étais pas loin d’une ligne HT qui suit le péninsule Nordkinn jusqu’au Mehamn – une véritable bouée de sauvetage. Je l’ai longé sur 6 km environ jusqu’à une colline dominante d’où, quand le ciel s’est dégagé vers la fin de l’après-midi, on pouvait admirer à NO les alentours de Bekkarfjord. Des là j’ai pris la descente vers NE pour rejoindre la jonction des vallées Overdalen et Lakkojohka. Avec le vent dans le dos elle était délicieuse. Le bivouac parmi des bouleaux l’était également.

Le deuxième jour de cette étape (11ème jour) s’est levé avec le soleil et peu de vent. Je suis descendu vers la rivière sans encombre où j’ai trouvé une piste balisée de motoneige qui remonte Lakkojohka. Je l’ai suivi jusqu’au vallon Nikolasdalen que je devais remonter vers NO. Heureusement son versant SO n’était pas trop en pente et la neige dans la forêt n’était pas trop profonde pour avancer lentement mais surement. Sur les hauteurs j’ai retrouvé la neige bien tassées et en obliquant vers NE je suis passé par un petit col (Gavdnjaskaidi) pour ensuite attaquer la montée vers le plateau Stohpogieles au N. Elle était assez dure surtout que le vent se soit renforcé et les bourrasques de neige aient rendu la visibilité très faible. Je me suis rabattu donc sur une ligne de poteau (ancienne ligne HT ? – non marqué sur la carte) – idéal pour rejoindre Hopsiedet, le passage obligé vers le Cap. Cela m’a permis d’avancer 10 km sans aucune visibilité ou presque. C’était assez monotone mais efficace – au totale 26 km dans la journée avec 250 m de dénivelée positive.

Langnesfjord
Langnesfjord (E de Hospeidet)

Le jour suivent (12ème jour) s’est installé un régime des bourrasques printanières : le beau soleil alternait avec des violents coup de vent et de neige. Cela a renforcé le caractère sauvage des ces paysages envoûtants. C’est ainsi que je suis arrivé à Hopseidet en suivent les derniers kilomètres une piste motoneige longeant la route nationale (pas très bruyante : une voiture tout les 15 min..). Hopseidet est une localité (une dizaine de maisons) placée dans l’étranglement de la péninsule Nordkinn où Eidsfjord à l’O et Landesfjord à l’E ne laissent qu’une étroite bande de terre ferme de 500 m entourée des falaises hautes de 250 – 300 m. Craignant par moment que la neige vire en pluie je suis vite remonté la piste vers le plateau au N. Là j’ai quitté la route et la ligne HT en cheminent au NE vers le lac Akersjohen. Mais le mauvais temps est revenu rendant la progression très lente et incertaine (vérification et correction du cap tout les 50 pas). J’ai décidé donc de revenir vers les poteaux d’une ligne désaffectée après un bivouac dans un endroit assez venté. Cette ligne n’est pas sur les cartes mais elle suit la nouvelle à 2-3 km à l’E.

Le 13ème jour, à 10 km devant Mehamn (lac Skillevanet) j’ai bifurqué vers NO et en traversant la route je suis monté vers la crête principale qui mène directement au Cap. Malgré les bourrasques qui ont freiné ma progression j’ai installé ma tente derrière un solide mur de neige, come prévu, à 15 km du Cap.

Campement
Campement au levé du soleil

Vers
Vers la tête de Nordkinn

Le lendemain (14ème jour) le temps était au beau fixe et avec le vent modéré. Je suis parti avec le sac à dos chargé des vivres pour la journée. D’abord j’ai suivi le flanc E de la péninsule avec des vues de plus en plus larges vers Magkeilfjord. Par les pentes parfois assez raides j’ai traversé la ligne des collines centrales pour descendre le vallon qui les suit à l’O (itinéraire habituel). De là il y a une magnifique vue sur la plage entouré des falaises, que les guides du coin appellent « Riviera ». A partir de là on attaque la dernière monté vers Nordkinnfielet – une large colline qui surplombe le dernier rocher du Cap Nordkinn ! Le moment était presque solennel : après 14 jours de cheminement et plus de 300 km parcourus j’ai été enfin là – à l’extrémité N de l’Europe continentale.

C'est
C'est le Cap Nordkinn

Et en plus en plein soleil avec le bleu de la mer de Barents qui contrastaient avec le blanc des collines environnantes, les deux séparés par le noir des falaises hautes de 250 m ! Grandiose ! J’ai retourné dans ma tente en suivent mes traces dans un état d’euphorie…

Nordkinnfielet
Nordkinnfielet - vue vers l'O

Au matin (15ème jour) il faisait toujours aussi beau avec tout de même un peu plus de vent - j’ai donc décidé de laisser la tente encore une nuit et explorer la côte O de la péninsule. Mais avant j’ai fait un crochet à l’E pour reconnaitre itinéraire vers Mehamn. Au retour j’ai constaté que le vent, qui s’est renforcé entre le temps a arraché des moreaux de mon mur. Au prix de plus d’une heure du travail de forçat je l’ai triplé et rehaussé (à ~1,6m) pour être prêt à affronter la tempête. Vers le milieu d’après-midi j’ai réussi de capter sur mon mobile le message du gardien d’ Adventure Camp à Mehamn qui m’adjoignait de rentrer immédiatement car il y avait une prévision d’une très forte tempête de neige pour 2-3 jours suivants. Dans cette situation (malgré des réserves de nourriture) j’ai décidé de quitter mon campement. Mais la montée au col s’est avérée impossible à cause d’un véritable ouragan qui me littéralement mettait à genoux (80-90 km/h – les bâtons volaient à l’horizontale). J’ai été obligé de contourner la colline me séparant de la descente par son flanc N, partiellement couvert des cailloux où ma pulka, poussé par le vent latérale s’accrochait partout. Cela a fini par arracher les lanières de traction – heureusement d’abord une et après l’autre se qui m’a permis d’y remédier par les tendeurs… Quand, après la première descente, le passage par un autre col était aussi impossible, je suis revenu sur mes pas sous la pleine lune et, complètement épuisé, j’ai réussi à planter ma tente dans un endroit relativement protégé du vent.

Nordkinnfielet
Nordkinnfielet -Magkeilfjord vers l'E

Le lendemain (16ème jour), miraculeusement, la tempête de neige n’était pas encore là alors j’ai réussi à franchir un autre col un peu plus au N et en remontant un petit vallon j’ai vue enfin Mehamn. Encore une petite heure et vers 11h je suis arrivé à l’Adventure Camp. C’était fini… Ce plus tard seulement que j’ai constaté les dégâts : les bouts de doits gelés (les gans mouillés…) et les deux pouces démis. Pour me consoler j’ai mangé au restaurent un excellent plat local (« torsketunger ») –sorte des baignés des langues de poissons et j’ai me suis acheté une autre spécialité norvégienne : « Ekte geinost » - fromage de chèvre fondu ( ?) au goût de caramel…
Par la suite j’ai fait une mini croisière de nuit sous la pleine lune (20h – 8h) entre Mehamn et Vadso sur un luxueux paquebot MS Trollfjord (75€ sans cabine). Le reste du retour : Vadso – Tana Bru – Ustjoki – Ivalo en bus et en voiture.

Fiche Technique
Parcours : Même si le trajet traversait les espaces peu fréquentées (je n’ai pas rencontré un seul skieur et seulement sept motoneiges – de loin) il était relativement bien sécurisé. Sur le total de 350 km presque la moitié a été parcourue soit sur les pistes balisées de motoneiges soit le long des poteaux des lignes électriques ( ou autres). En plus la route n’a pas été jamais très loin (2-10 km - sauf les 70 km entre Ustjoki et Ifjord) et j’ai pu chaque jour trouver une colline d’où on captait un réseau de mobile.

Cartographie :
- Kaamanen – Ustjoki : Ulkoilukartta Usjoki KEVO 1 :100000 et les tirages
au 1 :100000 du site http://www.retkikartta.fi
- Ustjoki – Ifjord : Statens Kartverk 1:50000 –Luosnjarga (2234-4) ; Sirbma (2235-3) ; Ifjordfjellet (2235 IV),
- Ifjord – Mehamn : tirages au 1 :50000 du site http://kart.statkart.no
Cartes topographique et de randonnées Finlande et Norvège.

Hébergement : auberges (7 nuits), cabane d’éleveurs, tente (10 nuits).
Transport : avion (520€), bateau (75€), bus-taxi (185€).
Coût total: 1650€ pour 21 jours

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